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       Procès du double assassinat de Bastia-Poretta : trois accusés sortent
       du silence
        
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       Au deuxième jour d'audience, trois des principaux accusés ont été
       amenés à s'exprimer sur leur parcours de vie. Alors qu'ils avaient
       gardé le silence face aux enquêteurs et au juge d'instruction, Ange-
       Marie Michelosi, Richard Guazzelli et son frère Christophe sont
       notamment revenus sur les assassinats de leur père respectif. Tous
       trois ont contesté fermement être les "héritiers" d'une bande
       criminelle.
        
       _"Basculement, déchirement, effroi, choc immense, détresse, crainte,
       solitude."_
        
       Ce sont les mots d'Ange-Marie Michelosi, Richard et Christophe
       Guazzelli quand ils évoquent, devant la cour d'assises des Bouches-du-
       Rhône, les assassinats de leur père respectif.
        
       Selon l'accusation, le mobile du double homicide de Poretta qui a ôté
       la vie à Jean-Luc Codaccioni et Antoine Quilichini serait la vengeance
       orchestrée par ces fils dont les pères, tués par balles, étaient
       présentés comme des figures du grand banditisme insulaire. Tout comme
       les deux victimes de la fusillade survenue le 5 décembre 2017 sur le
       parvis de l'aérogare.
        
       La salle des assises du palais Monclar où se déroule le procès du
       double assassinat de Poretta. Les débats vont durer jusqu'à début
       juillet. •  © J. Cappaï/FTV
        
       Mardi 7 mai, Ange-Marie Michelosi, ainsi que les frères Richard et
       Christophe Guazzelli, qui comparaissent pour ce double assassinat avec
       onze autres personnes, ont été interrogés dans cet ordre, l'un après
       l'autre, sur leur parcours de vie.
        
       Si, au cours de l'instruction, ils avaient choisi de garder le
       silence, les trois accusés ont adopté une tout autre attitude face à
       la cour.
        
       " _J'estimais que mes conditions de détention n'étaient pas
       normales",_ explique, poliment, Ange-Marie Michelosi pour justifier
       son mutisme antérieur. Et d'ajouter, face à une salle clairsemée par
       rapport à la veille : " _Je compte bien prendre aujourd'hui toutes mes
       responsabilités durant cette audience."_
        
       Jugé pour "complicité d'assassinats", il a été autorisé par le
       président, Jean-Yves Martorano, à changer de place dans le box afin de
       se rapprocher du micro positionné à proximité des jurés, afin que ces
       derniers puissent mieux le voir et l'entendre.
        
       Debout, vêtu d'une chemise noire, l'homme de 35 ans au crâne dégarni
       et à la carrure imposante déroule le fil de sa vie jusqu'à la mort
       brutale de son père, dont il porte le même prénom :
        
       _"Deux sœurs aînées, un foyer aimant, une enfance stable et joyeuse
       entre Ajaccio et le village d'Albitreccia, une bonne scolarité,
       normale, interrompue en troisième après un grave accident de moto."_
        
       Un accident qui l'a " _empêché de sortir de chez lui pendant un an",_
       précise-t-il. " _Après, j'ai eu le brevet puis j'ai travaillé comme
       commis de cuisine et serveur. Ensuite, j'ai perdu mon père quand je
       venais d'avoir 19 ans. Et depuis ma vie est un peu différente…"_
        
       Ange-Marie Michelosi (père) avait été assassiné le 9 juillet 2008 au
       volant de sa voiture, sur la commune de Grosseto-Prugna. Présenté par
       les services d'enquête comme faisant partie du grand banditisme en
       Corse-du-Sud, il était alors âgé de 54 ans.
        
       _"Votre vie a basculé à la mort de votre père ?",_ lui demande le
       président Martorano.
        
       _"On peut dire ça comme ça",_ répond l'accusé, qualifiant ses rapports
       avec son père de " _très bons, presque fusionnels"_.
        
       Son avocat, Emmanuel Molina, l'interroge sur ce " _basculement",_ sur
       ce qu'il a ressenti à ce moment-là.
        
       _"Maître,_ répond Ange-Marie Michelosi, _vous avez vu le soleil à son
       zénith ? Eh bien là, c'est comme si d'un coup, il avait fait nuit.
       C'est un basculement, un déchirement, c'est quelque chose qui change
       une vie, c'est assez compliqué. C'est de la survie presque",_ souligne
       celui dont la tante (Marie-Jeanne Bozzi) a été assassinée en avril
       2011.
        
       _"La situation est compliquée : mon père a été assassiné et la rumeur
       publique disait que je devais l'être aussi. J'ai ensuite perdu ma
       tante. On n'a pas été épargnés, ni gâtés",_ résume __ l'accusé, vanté
       pour sa " _générosité, sa gentillesse, ses valeurs et son respect des
       autres"_ par un témoin de moralité originaire du même canton que lui.
        
       Quant à savoir si les auteurs de ces deux assassinats pourraient être
       les mêmes, Ange-Marie Michelosi expose sa vision des choses, en
       regardant la cour, d'un air plus grave :
        
       " _Aucun de ces assassinats n'a été résolu. La justice n'a pas voulu
       juger les choses et s'en est fichue complètement. À aucun moment, je
       referai l'assassinat de mon père ni celui de ma tante. Je ne vais pas
       le refaire aujourd'hui. Je ne suis pas là pour accuser qui que ce
       soit, ce n'est pas mon rôle."_
        
       Depuis la disparition de son père, il dit " _vivre en se cachant, dans
       une forme de clandestinité totale, édictée par la survie"._
        
       Appelée à la barre en tant que témoin de moralité, sa sœur aînée
       s'adresse à la cour : " _On essaie souvent de présenter mon frère
       comme quelqu'un de dangereux, de violent. Il faut remettre les choses
       dans le contexte. On était très proches, très liés, dans l'amour. On a
       perdu notre père dans des conditions dramatiques. Il n'avait que 19
       ans, c'est moi qui ai dû l'appeler pour lui dire. Ce n'est pas simple.
       Pour nous tous, cela a été la double peine : la mort de notre père et
       le fait qu'on n'ait plus vu Ange-Marie qui devait faire attention pour
       sa vie. Il s'est retrouvé à avoir une vie de fugitif, à se cacher, ça
       n'a pas été facile pour tous les membres de la famille. C'est sûr que
       c'est plus vendeur pour les livres et les articles de le présenter
       comme un héritier."_
        
       **L'interview de Maître Emmanuel Molina, avocat d'Ange-Marie Michelosi
       :**
        
       durée de la vidéo : 00h00mn32s
        
       M.-F. STEFANI - J. CAPPAI - E. GIUGLIANO / FTV •  ©France Télévisions
        
       Actuellement incarcéré, Ange-Marie Michelosi a obtenu une licence 1 en
       philosophie durant sa détention et a _"été condamné à quatre reprises
       depuis 2007"_ , rappelle le président, notamment dans un dossier
       concernant des armes :
        
       _"Elles appartenaient à mon père,_ explique-t-il, calmement. _Ce
       n'était peut-être pas intelligent mais, sentimentalement, je ne me
       voyais pas les ramener au commissariat. C'étaient des fusils, pas non
       plus des lance-roquettes, car quand on entend dépôt d'armes, on pense
       qu'on est en train de livrer une aide militaire à l'Ukraine."_ La
       remarque décroche quelques sourires dans la salle et dans le box.
        
       Sa dernière condamnation concerne le trafic de stupéfiants qui aurait,
       selon les enquêteurs, financé l'opération de Poretta. Un dossier dans
       lequel il n'avait pas fait appel, à l'inverse des frères Guazzelli,
       tous deux condamnés en juin 2023 :
        
       _"J'ai décidé de ne pas faire appel car, au final, je ne pouvais pas
       me défendre,_ explique-t-il, toujours sur le même ton posé. _Le
       dossier étant le même, on aurait pu traiter le volet stupéfiants et le
       volet double assassinat en même temps. On nous a mis des peines
       gratuitement sans pouvoir nous entendre. C'est pour ça que je n'ai pas
       fait appel à l'époque."_
        
       Il assume sa condamnation pour ce trafic de cannabis faisant valoir
       une _"question de subsistance"_ due à sa situation de fugitif mais
       refuse d'être assimilé à un voyou ( _"je les vomis"_ déclare-t-il) et
       encore moins d'être considéré comme _"l'héritier d'un clan ou d'un
       groupe"_.
        
       _"Il n'y a aucun héritage de rien ; on a hérité de rien. Il n'y a
       aucune mainmise sur un territoire. Ça, c'est pour les gens qui ont
       envie d'être voyou. Je n'ai jamais pris un euro dans la poche de qui
       que ce soit et mon père non plus."_
        
       _"Il est héritier de l'amour que son père lui a donné, et de son nom
       et de son prénom",_ abonde le témoin du même canton, ému, le regard
       tourné vers Ange-Marie Michelosi.
        
       _"Je n'ai pas eu le choix. Ma vie d'aujourd'hui, je ne l'ai pas
       choisie",_ conclut l'accusé.
        
       Face à la cour, l'un après l'autre, Richard et Christophe Guazzelli
       ont eux aussi rejeté le terme "d'héritiers" de la Brise de Mer, une
       bande criminelle à laquelle leur père était suspecté d'appartenir
       selon les services d'enquête.
        
       " _On présente mon père selon les synthèses policières et les médias
       comme un pilier ou un baron de je ne sais quoi_ , déclare Christophe,
       le cadet. _On dit que je suis l'héritier d'un clan, d'un gang ou d'un
       système ; je ne suis l'héritier de rien. Ou du malheur, de la douleur,
       de la solitude."_
        
       Et de marteler : " _On n'a pas perdu un membre du clan, on a perdu
       notre papa. C'est cet homme-là qui nous manque et que l'on ne
       retrouvera plus jamais."_
        
       Se tournant vers Jacques Mariani, assis non loin de lui dans le box,
       Christophe Guazzelli fait référence à une phrase attribuée à son père,
       Francis Mariani. Tué en janvier 2009 dans l'explosion d'un hangar,
       l'homme qui était présenté comme un pilier de la Brise de Mer l'avait
       prononcée lors d'un procès aux assises, en 2008, dans cette même salle
       du palais Monclar d'Aix-en-Provence.
        
       _"Il disait que tout ça c'était de la pipette,_ cite Christophe
       Guazzelli _; ça se rapproche plus de la merde (sic), si vous me
       permettez et m'excusez d'être impoli Monsieur le président. Moi j'ai
       perdu mon père et basta ! Ce n'était pas la personne que l'on décrit.
       J'ai été éduqué loin de tout ce qui peut se rapprocher d'une forme de
       clan ou de gang."_
        
       Neuf accusés ont pris place dans le box, agrandi pour le procès. •  ©
       J. Cappaï/FTV
        
       Auparavant, son frère Richard (34 ans), accusé comme lui
       "d'assassinats en bande organisée", est longuement revenu sur leur "
       _enfance très heureuse et magnifique",_ passée entre Folelli, Bastia
       et leur village de La Porta, en Castagniccia.
        
       Comme Ange-Marie Michelosi avant lui, l'accusé a pu changer de place
       et s'installer devant le même micro.
        
       _"Avec mon frère, nous avons été élevés ensemble du fait de notre
       petit écart d'âge, 17 mois et un jour ; on nous a transmis un amour
       immense, les uns pour les autres, avec des parents aimants,
       protecteurs, hyper présents."_ En novembre 2006, naîtra un troisième
       frère.
        
       Selon les différentes dépositions des témoins de moralité, Richard est
       un _"garçon rayonnant, gentil, bien élevé, dans le respect des autres,
       exemplaire avec ses parents" ;_ Christophe est _"poli, gentil,
       respectueux, sportif"_. " _Deux enfants indissociables qui
       s'entendaient et se mélangeaient avec tout le monde"_ , ajoute leur
       mère, venue déposer à la barre, précisant que " _Christophe est d'une
       sensibilité extrême"_.
        
       _"Petit, j'étais turbulent, agité. Richard était plus calme, plus
       posé,_ confie le cadet devant la cour. _Mon père, qui était très
       généreux et aimait le partage, était pudique. Quand j'étais petit,
       j'étais un peu sa tempête, sa tornade. Au restaurant, combien de
       verres et d'assiettes ont volé,_ raconte-t-il en jetant un regard
       complice à son frère. _Mon père, ça le gênait, il devenait tout
       rouge."_
        
       Dans la salle, les jurés et le public sont suspendus au long récit de
       Richard Guazzelli. " _Essayez de cibler sur vous,_ tente de recentrer
       le président Martorano. _On sent que vous avez beaucoup de choses à
       dire. Il y a une forte admiration pour votre frère et un très fort
       attachement à votre père que vous avez qualifié "d'iconique"."_
        
       Au centre de ce foyer familial, les deux frères placent leur père,
       Francis Guazzelli.
        
       _"Un repère",_ insiste Richard avant d'évoquer le 15 novembre 2009,
       date à laquelle il a été assassiné à Penta-di-Casinca, alors qu'il se
       rendait en voiture à la chasse.
        
       Blazer noir cintré, visage fermé et grave, l'aîné - qui était âgé de
       19 ans à l'époque - parle avec prestance et retenue d'un " _monde qui
       s'effondre avant de basculer, d'une détresse, d'une immense
       solitude"_.
        
       _"Le sol se dérobe sous mes pieds,_ ajoute-t-il, serrant les dents
       pour contenir son émotion. _Je me sens seul. Il y a aussi de la peur,
       de l'effroi, un déchirement, de la crainte. Qu'est-ce qu'il se passe ?
       Je faisais des études de commerce, ça se passait très bien et je perds
       mon père."_
        
       **L'interview de Maître Jean-Charles Vincensini, avocat de Richard
       Guazzelli :**
        
       _
        
       durée de la vidéo : 00h00mn40s
        
       M.-F. STEFANI - J. CAPPAI - E. GIUGLIANO / FTV •  ©France Télévisions
        
       _
        
       Son frère Christophe, les yeux rougis par l'émotion, le soutient du
       regard en l'écoutant attentivement évoquer les conséquences de cette
       disparition pour sa famille :
        
       _"Ce mât de navire qu'était mon père n'est plus,_ lance-t-il, la gorge
       serrée. _Et il n'y a plus rien qui va Monsieur le président. Il
       occupait une place centrale pour chacun de nous dans notre famille.
       Mon père a disparu, ça arrive à beaucoup de monde mais moi, mon père,
       on me l'a pris. On l'a assassiné alors qu'il montait à la chasse."_
        
       _"Les gens qui nous ont enlevé notre père, ils nous ont éteint la
       lumière,_ dira Christophe Guazzelli à ce même micro, des sanglots dans
       la voix, au moment d'être interrogé par le président. _Notre petit
       frère est né le 16 novembre, il a fêté ses 3 ans au moment d'une
       veillée de mort. Ces moments-là, ces images-là… Toute sa vie, ce petit
       va fêter son anniversaire le lendemain de la mort de son père."_
        
       Dans les rangs de la défense, chez les proches des accusés jusqu'au
       banc de la partie civile, l'examen de personnalité des deux frères -
       qui n'avaient pas voulu s'exprimer pendant toute l'instruction -
       plonge la salle dans un silence de cathédrale. Seul le bruit sourd des
       moteurs du système de ventilation accompagne les mots des accusés.
        
       _"J'étais fou de mon père,_ lâche Christophe Guazzelli. _À travers ma
       passion pour le sport et le foot, j'ai compris qu'il pourrait encore
       plus s'intéresser à moi."_
        
       Doué pour le football, il avait quitté la Corse à 13 ans pour intégrer
       les centres de formation de Clairefontaine, Monaco puis Châteauroux.
       Une départ et un éloignement vécus _"comme un traumatisme"_ par son
       grand frère. À 17 ans, le jeune footballeur en devenir avait reçu une
       proposition de contrat professionnel du FC Nantes :
        
       _"Le regard que mon père a posé ce jour-là sur moi, c'était
       l'aboutissement,_ se remémore-t-il _. Je n'avais que faire du salaire,
       du contrat, de ce que cela représentait socialement. Il était fier de
       moi et j'étais devenu sa fierté. À partir de ce moment-là, il ne me
       quitterait plus. Ce serait lui qui serait auprès de moi. J'avais
       réussi à le rendre fier."_
        
       > Ma passion, c'était mon père.
        
       La brutale disparition de Francis Guazzelli mettra fin à l'aventure
       nantaise de son deuxième fils.
        
       _"C'est sûr que lorsque j'ai perdu mon père, je n'avais plus rien à
       faire sur un terrain. Le foot, ce n'était qu'un moyen de vivre ma
       passion. Ma passion, c'était mon père."_ Malgré l'insistance et l'aide
       de son frère Richard pour qu'il poursuive sa carrière, Christophe
       Guazzelli rangera définitivement ses crampons. Il quittera Nantes pour
       rentrer en Corse.
        
       _"Il n'avait plus la force de jouer, il était en lambeaux",_ concède
       Richard.
        
       Pour l'aîné, qui avait " _tout fait pour que son frère reste à
       Nantes"_ , ce retour dans l'île est _"très mal vécu"_ :
        
       _"Je voulais honorer une parole donnée à mon père de son vivant, qui
       était de tout faire pour que Christophe réussisse dans le foot. Quand
       on rentre de Nantes tous les deux, selon deux prismes différents, j'ai
       alors l'impression de soulager mon frère mais, d'un autre côté, je
       sais que je fais un manquement à ma parole donnée à mon père."_
        
       La main posée sur la vitre du box, le regard voilé par l'émotion,
       Christophe Guazzelli fait lui aussi part de son _"sentiment de
       culpabilité"_ à la cour. L'accusé âgé de 32 ans dit " _s'en vouloir et
       se sentir responsable"._
        
       _"Mon père avait décidé de s'investir dans ma carrière_ (de
       footballeur). _À l'époque, je ne le comprenais pas mais cela
       coïncidait avec une série de règlements de comptes qui ont touché des
       gens pour lesquels il avait beaucoup d'estime. Mon père, à ce moment-
       là, il avait l'intention de quitter la Corse et de venir vivre avec
       moi. J'avais 17 ans et je vivais seul dans mon appartement. Je lui ai
       demandé de respecter ça et de me laisser mon autonomie en ignorant le
       contexte. Le 15 novembre, j'ai compris que ça aurait pu lui sauver la
       vie si j'avais fait d'autres choix. J'aurais aussi préféré être dans
       cette voiture avec lui. Parce que vivre sans lui, c'est douloureux. Et
       vivre sans lui en ayant le sentiment de l'avoir condamné à ce triste
       sort, c'est invivable."_
        
       > Dans la famille, le mot "voyou" était tabou.
        
       Appelée en tant que témoin à la barre, la mère des deux accusés peine
       à contenir ses larmes en voyant ses deux enfants derrière la vitre du
       box. Tous deux sont incarcérés depuis près de 6 ans et demi.
        
       _"On n'a jamais vécu tout ce qui est écrit dans la presse, tout ce
       qu'on peut raconter, je n'ai rien vécu de tout cela,_ affirme la veuve
       de Francis Guazzelli. _Mon mari ne s'est jamais senti en danger, à
       aucun moment. Je n'ai jamais cherché à comprendre, on n'a jamais été
       confronté à aucun souci."_
        
       _"Dans la famille, le mot "voyou" était tabou. Francis voulait
       préserver ses enfants au maximum,_ avait expliqué un peu plus tôt dans
       la journée un témoin par visioconférence. _On parlait de chasse, de
       pêche, de football, on rigolait mais ça, c'était tabou.
       Complètement."_
        
       L'avocat général interroge la mère de famille sur les liens entre son
       mari et Richard Casanova, assassiné en avril 2008 à Porto-Vecchio.
        
       _"Ils étaient très proches, comme des frères. Richard s'est occupé de
       moi quand j'ai passé mon CAP à Marseille, comme si j'étais sa petite
       sœur."_
        
       Des trémolos dans la voix, elle évoque la mort de son mari : " _À
       partir du jour où le drame est arrivé, mon attention s'est focalisée
       sur Richard et Christophe. Je pensais que mes enfants allaient mourir,
       qu'on allait les tuer. Je ne les ai pas quittés pendant deux jours du
       regard, j'avais peur qu'on me les enlève."_
        
       Avocat de Christophe Guazzelli, Frank Berton s'adresse à la mère.
        
       _"Ils m'ont ému et j'ai un peu l'habitude d'être devant la cour
       d'assises"_ , souligne le pénaliste lillois en regardant vers les deux
       frères. Puis, il rebondit sur une question du président Martorano sur
       la notion de vengeance. Selon l'avocat, _"c'est_ _finalement le cœur
       du dossier"_ :
        
       _"Est-ce que vous avez pu à un moment donné la sentir ou voir
       Christophe plonger, s'enfoncer_ _?"_
        
       _"J'ai vu mon fils qui perdait pied complètement, qui mourait_ _; je
       l'ai vu mourir chaque jour. Je vivais dans la terreur. Quand
       Christophe est arrivé à la maison après l'assassinat de son père, j'ai
       croisé son regard et il était mort. Il avait 18 ans..."_
        
       Le procès reprendra lundi 13 mai à 9 heures avec la suite des examens
       de personnalité des autres accusés.
        
        
        
        
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