(C) Global Voices This story was originally published by Global Voices and is unaltered. . . . . . . . . . . Le sempiternel problème de la violence conjugale en Géorgie [1] [] Date: 2024-05-31 Cet article a d'abord été publié sur Chaikhana Media. Une version modifiée a été republiée ici dans le cadre d'un accord de partenariat de contenu. Une femme sur sept a subi des violences conjugales en Géorgie au cours de sa vie, selon un rapport publié en 2018 par ONU Femmes. Alors que les militants constatent que le pays progresse dans la lutte contre le problème, un mélange mortel de tabous culturels et de ressources limitées complique la réforme. Plus récemment, le débat sur les violences conjugales a été relancé lorsqu’une femme a horriblement été assassinée par son mari en novembre 2022. Lutter contre les violences conjugales a été en partie un défi, car traditionnellement, la police géorgienne considère la violence domestique comme un problème familial, et non comme un problème juridique. Baia Pataraia, une avocate spécialisée dans les droits humains qui a aidé à instaurer la première réforme légale qui criminalise la violence conjugale en Géorgie, souligne que pendant les deux premières années ni la police ni les tribunaux n'étaient intéressés à enquêter ou à engager des poursuites. Mais cela a changé en 2014 lorsqu’il y a eu un pic du nombre de femmes tuées par leurs agresseurs. Les meurtres ont provoqué un choc à travers le système. « C'était un peu comme une nouvelle vague de féminisme », raconte l'avocate, qui est également directrice de Sapari, une organisation pour femmes. « Nous étions ensuite en mesure d'adopter différentes règlementations et lois nécessaires pour permettre une enquête efficace et jusqu'à présent, nous avons une législation assez bien développée. » En tant que directrice d'un foyer d'accueil pour femmes maltraitées et leurs enfants dans la capitale, Tbilissi, Gvantsa Bakradze a vu de ses propres yeux l'impact des actions mises en place par la Géorgie pour lutter contre la violence domestique. Elle gère le St. Barbara Mother and Child Care Center, l'un des nombreux centres d'accueil privés pour femmes du pays. « Même en ce qui concerne la législation, beaucoup de choses ont changé, » constate-t-elle, ajoutant qu'elle est optimiste quant à l'avenir en raison des améliorations qui ont souligné l'importance de traiter les violences conjugales. Il y a même un changement dans la façon dont les femmes qui cherchent refuge se voient elles-mêmes et leur situation. « Je vois que les femmes sont vraiment fortes. Elles viennent avec beaucoup de problèmes et dans la plupart des cas, parviennent à les résoudre. Elles réussissent à construire leurs vies. Je ne pense pas que ce processus sera inversé de quelconque manière », a déclaré Gvantsa Bakradze. Au foyer d'accueil, géré par l'organisation caritative catholique Caritas, un sentiment de calme se dégage : des peluches parsèment le salon, l'odeur des plats faits-maison se répand depuis la cuisine, et les femmes discutent entre elles et prennent soin de leurs bébés ensemble. Elles sont en sécurité pour l'instant. L'accès aux centres d'accueil est une étape cruciale dans la lutte contre les violences conjugales : les femmes qui en sont victimes sont souvent financièrement dépendantes de leurs agresseurs et n'ont pas les moyens de trouver de nouveaux logements. Toutefois, les disponibilités des foyers d'accueil varient selon les différentes régions de la Géorgie, car le financement n'est pas disponible de manière égale. L'État géorgien finance cinq centres d'accueil dans le pays. Il gère également cinq centres de crise, où les femmes peuvent résider jusqu'à ce qu'elles trouvent un autre endroit où rester. De plus, il existe un numéro d'urgence géré par l'État pour fournir des informations et aider les victimes de violences. L'Agence Nationale des Soins de Géorgie gère tous ces services, même si la directrice de l'Agence, Meri Maghlaperidze, constate que des « lacunes » existent toujours dans le réseau des programmes et de l'assistance. Par exemple, la plupart des femmes préfèrent venir à Tbilissi parce qu'il y a de meilleures chances de trouver un emploi dans la capitale, et un revenu est essentiel pour devenir financièrement indépendante de leurs agresseurs. L'État offre actuellement aux femmes, par le biais d'apprentissages, la possibilité de développer une nouvelle compétence, telle que la cuisine ou la coiffure, ce qui pourrait leur permettre de se réorienter professionnellement. Mais ces programmes restent loin de pouvoir leur offrir l'aide dont elles ont besoin. « Un emploi immédiat les intéresse plus qu'un apprentissage, car elles veulent s'assurer un revenu le plus tôt possible », déclare Meri Maghlaperidze. Mais elle pense que l'un des plus grands obstacles a déjà été surmonté. « Lorsque nous avons adopté pour la première fois la loi sur la violence conjugale en 2006, les gens ont ri car ils pensaient que ce n'était qu'une affaire de famille ». Officiellement, les statistiques indiquent que le nombre de personnes poursuivies pour violences conjugales continue d'augmenter. Guram Imnadze, directeur du programme pour la démocratie et la justice au Centre de Justice sociale, soutient que l'approche de l'État est « fragmentée et inefficace ». Il note qu'en 2020, sur les 1 287 personnes reconnues coupables de violences conjugales, seulement 379 ont été condamnées à une peine de prison. Anna Arganashvili, une avocate spécialisée dans les droits de l'Homme au sein de l'ONG Partnership for Human Rights, explique que des problèmes majeurs subsistent dans la mise en œuvre de la loi, notamment en ce qui concerne la poursuite des agresseurs accusés. Par exemple, une récente affaire de violence conjugale très médiatisée a donné lieu à une campagne de dénigrement publique contre Neka Dorokashvili, l'ex-femme de Nikoloz Basilashvili, une star de tennis géorgienne. Le tennisman a été acquitté en octobre par le tribunal municipal de Tbilissi à la suite d'un procès de deux ans. Anna Arganashvili, qui travaille pour l'organisation qui a défendu son ex-femme, a dit : Tout le monde pense qu'il ne peut pas être un agresseur, car il est célèbre. Nous recevons beaucoup de menaces, car pour eux, son ex-femme n'aurait jamais dû l'accuser, parce qu'il est champion du monde, et elle aurait donc dû se taire pour lui permettre de rendre la Géorgie célèbre. … Sur le papier, nous progressons, mais en réalité, je ne vois pas beaucoup de progrès. Au fil des ans, elle a commencé à éduquer les jeunes sur les violences domestiques et leurs droits puisque « la simple existence des lois n'est pas une solution ». À ce jour, elle a développé une émission télévisée pour les enfants afin de les informer sur leurs droits et de rendre la loi compréhensible. Elle est convaincue que si les filles se sentent en sécurité en tant que femmes, cela entraînera un changement. Baia Pataraia, une avocate et militante, remarque que la mise en œuvre reste « problématique ». « Nous avons fait des progrès, nous avons maintenant une meilleure législation, même si la mise en œuvre reste compliquée. Le système judiciaire n'est ni sensible au genre ni axé sur les victimes, » dit-elle, en ajoutant que la société tout entière continue de privilégier les agresseurs aux victimes, et les hommes aux femmes. « Surtout si un homme est puissant et est célèbre, il est encore plus difficile pour une femme de défendre sa propre vérité ». En 2022, le bureau du procureur de Géorgie a signalé 16 cas de féminicides pour les dix premiers mois. Dans un communiqué publié le 25 novembre, journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le Bureau du Défenseur public de Géorgie a déclaré, « en dépit des changements législatifs ou institutionnels, la violence faite aux femmes et les violences conjugales en Géorgie restent un défi de taille ». Le jour même, plusieurs dizaines de femmes sont descendues dans la rue pour manifester contre les violences qu'elles subissent. [END] --- [1] Url: https://fr.globalvoices.org/2024/05/31/287828/ Published and (C) by Global Voices Content appears here under this condition or license: https://globalvoices.org/about/global-voices-attribution-policy/. via Magical.Fish Gopher News Feeds: gopher://magical.fish/1/feeds/news/globalvoices/